Valluis Avocats

Nathalie Valluis, Avocat – Octobre 2021

LE PRINCIPE

Après des délais accordés en raison de la crise sanitaire, la Directive (UE) 2018/822 du 25 mai 2018, dite «DAC 6» est désormais pleinement applicable.

Elle oblige les intermédiaires ou, dans certains cas, les contribuables eux mêmes, à déclarer à l’administration fiscale les dispositifs transfrontières de planification fiscale à caractère potentiellement agressif.

L’objectif est de réagir rapidement aux pratiques fiscales dommageables et de remédier aux lacunes identifiées (par voie législative ou dans le cadre des contrôles fiscaux).

LES ACTIONS À MENER

La Directive affiche une vocation large, conduisant certains secteurs, notamment bancaire, à mener une analyse de fond de ses impacts.

 

Pour gérer au mieux cette nouvelle norme, il est essentiel d’établir, par métier, une cartographie exhaustive et évolutive des produits distribués et des schémas dans lesquels l’établissement financier intervient à un titre quelconque (conception, mais aussi financement, conseil…).

Ceci permet :

  • la détection rapide et continue des schémas à déclarer
  • la mise en place de processus de remontée d’information efficaces en interne
  • l’attribution des responsabilités d’analyse et de déclaration
  • le développement des outils informatiques nécessaires.

LA NOTION D’AVANTAGE PRINCIPAL

Un dispositif transfrontière doit être déclaré lorsqu’il comporte un ou plusieurs marqueurs prévus par la Directive.


Certains marqueurs sont autonomes : leur existence suffit à faire rentrer le dispositif dans le champ de DAC 6.


D’autres n’ont d’impact que s’il est également établi que l’avantage principal du dispositif est de nature fiscale (abattement, remboursement, allégement ou diminution d’impôt, réduction de dette fiscale, report d’imposition, absence d’imposition…).


Ce critère est analysé de manière globale (effets du schéma au sein et en dehors de l’UE) et objective. Il peut donc être rempli même si l’obtention de l’avantage fiscal n’est pas recherchée par le contribuable (pas de prise en compte de ses motivations).


Cependant, lorsque l’avantage obtenu en France au moyen du dispositif transfrontière résulte de l’utilisation d’une mesure d’incitation fiscale prévue par la loi française, il n’est pas considéré comme un avantage fiscal principal, sous réserve du respect de l’intention du législateur (i.e. objectif poursuivi par le législateur au travers du régime de faveur).

QUELLES DILIGENCES POUR L’INTERMÉDIAIRE «SACHANT» ?

La doctrine administrative donne d’utiles renseignements sur cet aspect.


BOI-CF-CPF-30-40-10-20, n°70


«L’article 1649 AE du CGI définit l’intermédiaire prestataire de services comme toute personne qui, compte tenu des faits et circonstances pertinents et sur la base des informations disponibles, de l’expertise et de la compréhension nécessaires pour fournir de tels services, sait ou pourrait raisonnablement être censée savoir qu’elle s’est engagée à fournir, directement ou par l’intermédiaire d’autres personnes, une aide, une assistance ou des conseils concernant la conception, la commercialisation, l’organisation, la mise à disposition aux fins d’une mise en œuvre ou la gestion de la mise en œuvre d’un dispositif transfrontière déclarable.»


BOI-CF-CPF-30-40-20, n°130


«Le déclarant est tenu de déclarer les informations dont il a connaissance, qui se trouvent en sa possession ou qui sont sous son contrôle à la date du fait générateur de l’obligation déclarative. Aucune sanction n’est susceptible de s’appliquer dans le cas où le déclarant ne déclare pas une information dont il n’a pas connaissance, qui ne se trouve pas en sa possession ou sous son contrôle». Un intermédiaire n’est pas tenu d’aller au-delà des exigences prévues par les différentes règles professionnelles et règles de connaissance de la clientèle applicables lorsqu’il recueille et déclare les informations nécessaires à la déclaration prévue à l’article 1649 AD du CGI.»

UN EXEMPLE : LES CONTRATS D’ASSURANCE-VIE ÉTRANGERS, DÉCLARABLES OU PAS?

Les commentaires administratifs sur la question des contrats d’assurance-vie étrangers illustrent la subtilité de l’approche à retenir et l’obligation d’une analyse au cas par cas.

 

BOI-CF-CPF-30-40-30-10, n°170

 

«Marqueur B.2. : Un dispositif qui a pour effet de convertir des revenus en capital, en dons ou en d’autres catégories de recettes qui sont taxées à un niveau inférieur ou ne sont pas taxées. (…)

 

Exemple 2 : Un contribuable fiscalement domicilié en France place des actifs de source française sur un contrat d’assurance-vie souscrit dans un État B, ce qui ouvre droit à une exonération d’impôt sur le revenu à raison des gains afférents aux placements financiers ainsi réalisés.

 

Le fonctionnement d’un contrat d’assurance-vie suppose un dessaisissement des fonds versés au profit de l’assureur qui les gère ensuite de façon autonome. Or, contrairement à l’apparence donnée par les actes juridiques passés, le contribuable conserve en réalité la gestion des montants investis, qui sont utilisés pour souscrire à des obligations d’une société qu’il contrôle, et ce, dès la souscription du contrat.

 

Ce schéma permet de transformer des revenus en principe imposables en France au nom de la personne physique, en revenus perçus et exonérés dans l’État membre où l’assurance-vie a été souscrite.

 

Conclusion: Ce dispositif revêt les caractéristiques du marqueur B.2.»